ENCORE DE NOUVEAUX PARTENAIRES DU PROCES PENAL ! C. Lacroix

Caroline Lacroix

MCF HDR Droit privé & sciences criminelles

Le législateur est intervenu, à de nombreuses reprises, pour permettre aux associations, par la technique de l’habilitation, de poursuivre certaines infractions ayant un lien avec leur objet social par dérogation à l’exigence d’un préjudice personnel découlant directement de l’infraction, telle que posée par l’article 2 du Code de procédure pénale.

Les conditions d’habilitation auxquelles les diverses associations doivent répondre -tant pour les associations elles-mêmes que pour l’exercice de l’action en justice- ne sont pas unifiées : aussi a-t-on pu comparer le régime juridique de recevabilité de constitution de partie civile à « un inventaire à la Prévert » (Expression issue d’un article de O. Kuhnmunch, « La défense des intérêts collectifs et l’éclatement des poursuites », Arch. pol. crim. 1988. 35 et reprise par Pierre-Olivier Sur, « L’action pénale des Associations de défense de victimes 1901-2001 », Gaz. Pal. 10-14 août 2001, chr. p. 5). La diversité des régimes tient à la nature de l’infraction – action limitée ou non à une liste d’infractions déterminées par la loi –, au caractère du préjudice – direct ou indirect –, à l’attitude de la victime directe – accord ou constitution de partie civile préalable à l’action de l’association – ou du ministère public – action publique déjà mise en mouvement–, à l’ancienneté de l’association – déclaration antérieure de trois ou cinq ans à l’infraction – , ou à son statut – agrément, reconnaissance d’utilité publique. Ainsi en matière de terrorisme, il était déjà prévu que les associations déclarées depuis au moins cinq ans, se proposant, par ses statuts, d’assister les victimes d’infractions, pouvaient exercer les droits reconnus à la partie civile dans le cas d’infractions terroristes, lorsque l’action publique a été mise en mouvement par le ministère public ou la partie lésée. La loi du 3 juin 2016 (Loi n° 2016-731 du 3 juin 2016 renforçant la lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement, et améliorant l’efficacité et les garanties de la procédure pénale), modifiant l’article 2-9 du code de procédure pénale permet désormais également aux associations ad hoc créées post attentat et ayant pour objet statutaire la défense de victimes d’infractions terroristes d’exercer les droits reconnus à la partie civile, sans condition d’ancienneté, à l’image des associations de victimes d’accidents collectifs (article 2-15 du CPP).

Par ailleurs, les associations ne seront plus les seuls groupements autorisés à agir. L’action des fondations vient d’être consacrée. Jusqu’à lors, en raison de l’impossible assimilation entre ces dernières et les associations visées par les articles 2-1 à 2-23 du code de procédure pénale, (en ce sens, R. Lorrain, La problématique de la constitution de partie civile des fondations, Dalloz actualité, chron. 11 septembre 2014), leur action était irrecevable dès lors qu’elles ne justifiaient pas avoir subi un dommage direct et personnel en raison de la spécificité du but et de l’objet de leur mission. Dorénavant, au titre de la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du 21e siècle, les fondations reconnues d’utilité publique pourront désormais exercer les droits reconnus à la partie civile au cours du procès pénal dans les mêmes conditions que les associations. A l’origine, un article additionnel, introduit à l’Assemblée nationale en première lecture visait seulement à reconnaître une telle possibilité aux fondations reconnues d’utilité publique en cas d’atteintes volontaires à la vie et à l’intégrité d’un mineur en application de l’article 2-3 du code de procédure pénale. En séance publique, la disposition a été étendue pour couvrir tous les cas dans lesquels une fondation reconnue d’utilité publique peut exercer les droits reconnus à la partie civile, dans les mêmes conditions et sous les mêmes réserves que les associations mentionnées aux articles 2-1 à 2-23 du code de procédure pénale. Voilà une modification qui ne manquera pas de faire grincer des dents ceux qui dénonçaient déjà la surreprésentation de l’accusation privée dans l’instance pénale (X.Pin, « La privatisation du procès pénal », RSC 2002 p. 245).