Pour assister à la journée, inscription gratuite mais obligatoire, avant le 16 mai : christophe.traini@sciencespoaix.fr
AFFICHE ET PROGRAMME AU FORMAT PDF
Depuis plusieurs décennies, la figure de la victime n’a cessé d’occuper une place croissante au sein de l’espace public. Certains travaux historiques ont bien retracé les évolutions et entreprises qui ont favorisé une reconnaissance sociale croissante au statut de victime (Fassin & Rechtman, 2007). Les spécialistes de l’étude des mobilisations, pour leur part, ont bien analysé dans quelle mesure le registre victimaire pouvait, d’une manière générale, constituer un puissant ressort des actions collectives (Lefranc & Mathieu, 2009 ; Jouzel & Prete, 2015 ; Salaris, 2017). Dès lors que les promoteurs de causes collectives investissaient les arènes judiciaires, bon nombre de travaux (Henry, 2003 ; Fillion & Torny, 2015 ; Chappe & Keyhani, 2018) ont pu examiner la diversité et la complexité des « processus de victimisation par le droit » (Jakšić & Ragaru, 2019, p.2). Dans cette optique, les
observateurs ont plus particulièrement relevé la nécessité d’analyser la nature des rapports entre, d’une part la parole émouvante des victimes, et d’autre part les procédures et les énoncés experts des professionnels du droit (Barbot & Dodier, 2009, 2014, 2017).
Dans un contexte de judiciarisation croissante des luttes contre les changements climatiques (Cournil & Varison, 2018), la place des victimes mérite d’être à nouveau questionnée. Il s’agit, en effet, ici de s’insurger contre un dommage diffus dont la responsabilité pourrait aisément être imputée au mode de vie énergivore de chacun des citoyens : tous également responsables ? Tous également victimes ? Pourtant, au cours des actions contentieuses lancées ces dernières années afin de lutter contre les dérèglements climatiques, il est parfois autant question de désigner des responsables que d’identifier des victimes plus particulièrement affectées au regard de diverses évaluations expertes (cartographies des risques à venir, catégories juridiques, concepts de la philosophie morale, diagnostiques psychologiques…).
Les intervenant·e·s, au cours de cette journée d’étude pluridisciplinaire, interrogent les tenants et aboutissants de la place qui est accordée à la figure de la victime dans le cadre de plusieurs contentieux climatiques. Dans quelle mesure le registre victimaire permet-il de mobiliser plus aisément des soutiens parmi les profanes du droit ? Quelles sont les argumentaires juridiques que des témoignages de victimes sont susceptibles d’étayer ? Quels liens le registre victimaire entretient-il avec « l’intérêt à agir » que la justice exige des plaignants ? Comment certaines souffrances peuvent faire l’objet d’une qualification experte, telle l’éco-anxiété ? Dans quelle mesure, au final, les témoignages et expertises relatives aux victimes pourraient effectivement compter dans les décisions prises par des magistrats ?