LE SAVOIR EN DANGER
Menaces sur la liberté académique
Olivier BEAUD, PUF, 2021.
Auteur d’un précédent ouvrage sur Les Libertés universitaires à l’abandon ? (Dalloz, 2010), Olivier Beaud, professeur de droit public à l’université de Panthéon-Assas, défend avec conviction la liberté académique qu’il estime menacée, y compris dans des démocraties libérales comme les États-Unis, le Royaume-Uni ou l’Allemagne. C’est en mars 2019 qu’Olivier Beaud situe le point de départ en France des menaces contre la liberté académique, l’atteinte la plus marquante étant l’interruption de la pièce Les Suppléantes d’Eschyle à la Sorbonne par un groupe d’activistes militants, suivie par des querelles sur « l’islamo-gauchisme » et le « décolonialisme ».
Défendre la liberté académique (au singulier) suppose de pouvoir cerner plus précisément cette notion, exercice délicat auquel se livre avec conviction l’auteur. La liberté académique ne saurait toutefois être absolue car il s’agit d’une liberté professionnelle sous-tendue par une éthique académique et le respect des obligations déontologiques.
Elle ne doit pas être confondue avec la liberté d’expression, cette dernière n’étant qu’une des composantes de la liberté académique qui inclut aussi la liberté de recherche et la liberté d’enseignement. Si la liberté d’expression d’un professeur mérite d’être protégée, c’est toutefois à la condition que l’opinion défendue soit fondée sur un savoir. En revanche, lorsqu’un universitaire s’exprime hors de la sphère académique sur des questions pour lesquelles il ne peut justifier d’une légitimité particulière, il jouit seulement de la liberté d’expression accordée à tout citoyen.
Parmi les menaces identifiées par l’auteur figurent l’ingérence du pouvoir politique, les entraves dues à l’Administration ainsi qu’à une « caporalisation » de la recherche. Est notamment dénoncée la part grandissante des tâches administratives imposées aux universitaires au détriment de leurs activités d’enseignement et de recherche. Ce transfert indu d’une tâche administrative vers le corps professoral a été aggravé durant l’épidémie de Covid-19, plus particulièrement lors de l’organisation des examens en distanciel. Olivier Beaud appelle à la rébellion contre cette nouvelle forme de despotisme.
La lecture de cet ouvrage ne peut qu’être conseillée aux universitaires, quels que soient leurs domaines de spécialité. Son contenu sera peut-être soumis à la critique, dans le respect de la liberté académique…