JAC n°241/Novembre 2024

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Isabelle Corpart

Maître de conférences en droit privé à l’Université de Haute-Alsace

CERDACC

Commentaire de CA Versailles, 12 janvier 2017, n° 15/06625

 Les sommes versées à un époux par le Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme ne sont pas à prendre en considération dans le cadre du calcul de la prestation compensatoire dont il est débiteur envers son ex-femme à la suite de leur divorce.

Mots clef : actes de terrorisme – disparité entre les conditions de vie des époux – divorce – fonds de garantie – handicap – indemnisation – prestation compensatoire – victime

Pour se repérer

  1. Mohamed L. et Mme Mabroka El K., de nationalité française, se sont mariés en 1995 en Tunisie. Après leur séparation, leur divorce pour altération définitive du lien conjugal est prononcé en octobre 2011, les effets du divorce étant reportés à la date du 27 août 2011. Le jugement condamne le mari à verser à son ex-épouse une prestation compensatoire sous forme de capital, d’un montant de 50 000 €. Pour fixer ce montant, les juges prennent en considération, en tant que ressource financière du débiteur, l’indemnisation perçue par M. Mohamed L., victime d’un attentat terroriste en 2003 à Riyad en Arabie Saoudite. Ce dernier interjette appel, contestant les conséquences financières du divorce.

Pour aller à l’essentiel

Un époux a perçu une importante indemnisation destinée à compenser le handicap dont il souffre après un attentat dont il a été victime en 2003 et que lui a versée à ce titre le Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et autres infractions. Pour la Cour d’appel de Versailles, ce montant n’a toutefois pas à figurer parmi les ressources retenues pour déterminer le montant d’une prestation compensatoire prévue dans les suites d’un divorce pour altération définitive du lien conjugal.

Les sommes versées au titre de cette indemnisation ne doivent pas servir à apprécier l’existence d’une disparité dans la situation des époux, élément indispensable pour que l’un d’entre eux devienne créancier d’une prestation compensatoire.

Une fois ces éléments écartés, la prestation compensatoire versée à l’épouse doit être diminuée pour viser seulement un capital de 15 000 euros.

Pour aller plus loin

 Il est vrai que l’un des époux peut être tenu de verser à l’autre une prestation compensatoire au moment du divorce, en fonction de la situation du couple lors du prononcé du divorce et de son évolution dans un avenir prévisible (C. civ., art. 270). Quant à lui, l’article 271 du Code civil tient compte de l’ensemble des ressources du couple pour déterminer le montant dû par un époux à l’occasion de son divorce et également de l’état de santé des époux, lorsque le juge met à la charge de l’un d’eux une prestation compensatoire (mais aussi dans le cadre du nouveau divorce par consentement mutuel, par acte sous signature privée, contresigné par avocats, déposé au rang des minutes d’un notaire, issu de la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016, C. civ., art. 229).

Ce versement est destiné à compenser la disparité que le divorce crée dans les conditions de vie respective des époux et prend, en principe, la forme d’un capital.

Il s’agissait en l’espèce de connaître le sort à réserver aux indemnités perçues par une victime d’actes de terrorisme, le mari ayant perçu une indemnisation en vue de compenser son handicap.

Il convient de tenir compte des ressources des époux mais aussi de leurs besoins et de leur situation actuelle et à venir. Or, on notera que les besoins du mari ont augmenté en l’espèce à la suite de l’attentat dont il a été victime en 2003 et c’est à ce titre qu’il bénéficie d’une aide financière du Fonds de garantie. Par la suite, il a subi un syndrome de stress post-traumatique, avec une incapacité temporaire totale de travail du 12 mai 2003 au 29 octobre 2005. Son incapacité permanente partielle a été fixée par l’expert à 8 %. Il s’est vu reconnaître l’existence de troubles dans les conditions d’existence du 12 mai 2003 au 29 octobre 2005 et un préjudice spécifique aux victimes d’actes de terrorisme. Sa souffrance endurée a été évaluée à 4 sur l’échelle de 7. Sa consolidation a été fixée aux 29 octobre 2005, date à laquelle il a été considéré par l’expert qui l’a examiné qu’il était apte à reprendre une activité professionnelle à plein temps.

Il a reçu différentes provisions à valoir sur l’indemnisation de son préjudice entre 2003 et 2008, sommes qu’il a utilisées avec son épouse pour régler les charges du ménage, puis en 2008 il a perçu le solde de son indemnité soit un montant de 120.000 €, investi dans l’achat d’une boulangerie pâtisserie (dont il s’est retiré depuis).

Dès lors cette somme doit lui devenir en raison de son handicap et elle ne saurait être détournée de son objectif qui est de venir en aide à la victime elle-même. En conséquence, il n’y a pas lieu qu’elle soit comptabilisée dans les ressources du couple servant à déterminer le capital devant être versé à l’ex-épouse dans le cadre du divorce, d’autant que le handicap du mari a augmenté ses besoins.

Le Conseil constitutionnel dans une décision rendue le 2 juin 2014 (Cons. constit. n° 2014-398 QPC, JO 4 juin 2014, D. 2014. 1202, AJ famille 2014, 427, note S. Thouret, RTD civ., 2014, 628, obs. J. Hauser) a effectivement abrogé l’alinéa 2 de l’article 272 du Code civil à la suite d’une QPC (question prioritaire de constitutionnalité), relevant que « l’interdiction de prendre en considération, pour fixer le montant de la prestation compensatoire, les sommes versées au titre de la compensation d’un handicap institue entre les époux des différences de traitement qui ne sont pas en rapport avec l’objet de la prestation compensatoire et méconnaît ainsi le principe de l’égalité devant la loi », tout en insistant sur le fait que les sommes versées à une personne en raison de son handicap, lié en l’occurrence à des actes de terrorisme, ne sauraient être détournées de leur objet pour être affectées au versement de la prestation compensatoire dont cette personne est débitrice.

Elles ne peuvent pas, en conséquence, être comptabilisées dans le calcul d’une prestation compensatoire et servir au juge à apprécier une éventuelle disparité dans la situation des époux séparés. Dans la mesure où le calcul de la prestation compensatoire ne doit pas inclure ces sommes litigieuses, le capital versé par l’ex mari doit être réduit de 50 000 à 15 000 euros.

* * *

 

Cour d’appel, Versailles, 2e chambre, 2e section, 12 Janvier 2017 – n° 15/06625

FAITS ET PROCEDURE,

Monsieur Mohamed L. et Madame Mabroka EL K. se sont mariés le 27 février 1995 à TATAOUINE (TUNISIE).

Deux enfants sont nés de cette union.

– Adam né le 11 août 1996 : majeur,

– Camélia née le 21 janvier 2002 encore mineure.

Par jugement du 20 août 2015, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de NANTERRE a :

– constaté que l’ordonnance de non conciliation autorisant les époux à résider séparément est en date du 28 octobre 2011,

– prononcé pour altération définitive du lien conjugale le divorce des époux,

– ordonné le report des effets du divorce à la date du 27 août 2011,

– ordonné la liquidation du régime matrimonial et donne acte aux époux de leurs propositions de règlement des intérêts pécuniaires,

– condamné Monsieur L. à verser à son épouse à titre de prestation compensatoire, la somme de 50.000 €,

– reconduit l’intégralité des mesures provisoires adoptées dans l’intérêt des enfants communs,

– débouté les parties du surplus de leurs demandes,

– dit que les dépens seront partagés par moitié entre les époux.

Le 21 septembre 2015, Monsieur L. a interjeté un appel partiel de cette décision portant sur les conséquences financières divorce ( prestation compensatoire et contribution à l’entretien et à l’éducation des enfants).

Par ordonnance du 8 mars 2016, le conseiller de la mise en état de la cour d’appel de VERSAI LLES a déclaré irrecevables car tardives les conclusions déposées par Madame EL K. le 12 janvier 2016.

Suite à une requête afin de déféré du 22 mars 2016 déposée par Madame EL K., par arrêt du 19 juillet 2016, la cour d’appel de VERSAILLES a :

– confirmé la décision entreprise,

– débouté les parties de leurs autres demandes,

– laissé les dépens à la charge de Madame EL K.,

– condamné Madame EL K. à verser 1.500 € à Monsieur L. au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions du 17 octobre 2016, Monsieur L. demande à la cour de :

– recevoir Monsieur L. en son appel et l’y déclarer bien fondé,

– infirmer le jugement du 20 août 2015 en ce qu’il a :

– condamné Monsieur L. à verser à Madame EL K. la somme de 50.000 € au titre de la prestation compensatoire,

– condamné Monsieur L. à verser à Madame EL K. la somme mensuelle de 900 €, soit 450 € par enfant et par mois, au titre de sa contribution à l’entretien et à l’éducation de ses enfants,

Et statuant à nouveau :

– constater que la rupture du mariage ne crée pas de disparité dans les conditions de vie respectives des parties au moment du divorce,

En conséquence,

– dire qu’il n’ay pas lieu à prestation compensatoire,

– constater l’insolvabilité de Monsieur L.,

En conséquence,

– supprimer la contribution à l’entretien et à l’éducation des enfants mise à la charge de Monsieur L.,

– statuer ce que de droit sur les dépens.

Pour un exposé plus détaillé des moyens et prétention de Monsieur L., la cour renvoie à ses écritures, conformément à l’article 455 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture a été prononcée le 18 octobre 2016.

SUR CE, LA COUR

À l’audience il a été mis aux débats la décision du conseil constitutionnel du 2 juin 2014 qui avait été saisi le 2 avril 2014 par la Cour de cassation d’une question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité aux droits et libertés que la constitution garantit du second alinéa de l’article 272 du Code civil.

Le conseil de Monsieur L. n’a pas souhaité reprendre des écritures dans le cadre d’un renvoi d’audience sur ce point précis.

Sur la juridiction compétente et la loi applicable :

Les époux se sont mariés à TATAOUINE en Tunisie le 27 février 1995. Ils sont tous deux de nationalité française. Au moment de l’introduction de la requête en divorce le domicile de la famille était fixé en France. La juridiction française est compétente et la loi française applicable, ce qui n’est pas contesté par Monsieur L..

Sur la prestation compensatoire :

Monsieur L. reproche au premier juge de s’être situé pour fonder son appréciation au moment de l’ordonnance de non-conciliation, sur des éléments du passé sans prendre en considération leur évolution au moment du prononcé du divorce ni dans un avenir prévisible. Il ajoute que sa situation s’est considérablement dégradée et il critique le premier juge en ce qu’il a pris en compte l’indemnisation qu’il a perçue suite à l’attentat terroriste dont il a été victime.

En application de l’article 270 du code civil, l’un des époux peut être tenu de verser à l’autre une prestation destinée à compenser, autant qu’il est possible, la disparité que la rupture du mariage crée dans leurs conditions de vie respectives, en fonction de la situation au moment du prononcé du divorce et de l’évolution dans un avenir prévisible. Il y a lieu de tenir compte, notamment, de la durée du mariage, de l’âge et de l’état de santé des époux, de la qualification et de la situation professionnelles des époux, des conséquences des choix professionnels faits par l’un des époux pendant la vie commune pour l’éducation des enfants et du temps qu’il faudra encore y consacrer ou pour favoriser la carrière de son conjoint au détriment de la sienne, du patrimoine estimé ou prévisible des époux, tant en capital qu’en revenu, après la liquidation du régime matrimonial, de leurs droits existants et prévisibles, de leur situation respective en matière de pension de retraite.

Au terme de l’article 274 du code civil, le juge décide des modalités selon lesquelles s’exécutera la prestation compensatoire en capital ; celles-ci sont limitativement prévues par la loi et l’article 275 du code civil précise que lorsque le débiteur n’est pas en mesure de verser le capital dans les conditions prévues à l’article 274, le juge fixe les modalités de paiement du capital, dans la limite du huit années, sous la forme de versements périodiques indexés selon les règles applicables aux pensions alimentaires.

Il convient de rappeler que la prestation compensatoire n’est pas destinée à égaliser les fortunes ni à corriger les conséquences du régime matrimonial adopté par les époux et qu’elle doit permettre d’éviter que l’un des époux ne soit plus atteint que l’autre par le divorce ; que pour le surplus, les simples espérances successorales, par définition incertaines, n’ont pas à être prises en compte pour l’appréciation de la prestation compensatoire.

Les époux se sont mariés en 1995. Le divorce a acquis force de chose jugée en 2015. Le mariage a donc duré 20 ans et la vie commune 16 ans. Au moment du divorce Monsieur L. était âgé de 54 ans et son épouse de 46 ans.

Contrairement à son épouse, Monsieur L. a eu des problèmes de santé suite à un attentat terroriste dont il a été victime en 2003 à Riyad en Arabie. Monsieur L. a subi un syndrome de stress post-traumatique en relation directe avec ces faits. Il a eu une incapacité temporaire totale de travail du 12 mai 2003 au 29 octobre 2005. Son incapacité permanente partielle a été fixée par l’expert à 8 %. Il s’est vu reconnaître l’existence de troubles dans les conditions d’existence du 12 mai 2003 au 29 octobre 2005 et un préjudice spécifique aux victimes d’actes de terrorisme. Sa souffrance endurée a été évaluée à 4 sur l’échelle de 7. Sa consolidation a été fixée aux 29 octobre 2005, date à laquelle il a été considéré par l’expert qui l’a examiné qu’il était apte à reprendre une activité professionnelle à plein temps.

Monsieur L. a occupé un poste d’ingénieur informaticien jusqu’à son départ en Arabie Saoudite où il a travaillé trois ans au sein de la société IBM Arabie Saoudite avant d’être victime d’un attentat terroriste. Il a été en arrêt de travail jusqu’au mois de novembre 2010 date à laquelle il a repris une activité professionnelle en qualité directeur de projet. Il a déclaré au titre de ses revenus 2011 la somme imposable de 46.632 €. Il a cessé d’être salarié à compter du 1er novembre 2011. Il est attesté en 2014 par le directeur du cabinet Générale Europe Consultants qui a suivi sa carrière depuis 1990 que Monsieur L. n’a pu mener à bien ses contrats de travail depuis 2010 bien qu’ayant réussi à se faire embaucher par trois entreprises. Le témoin ajoute que Monsieur L. n’arrive pas à surmonter ses difficultés de s’intégrer de nouveau dans le secteur de l’informatique » et préconise une reconversion professionnelle.

En 2012 Monsieur L. a bénéficié de l’ARE et percevait environ 3100 € par mois. Il justifie pendant cette période de ses recherches d’emploi.

Il produit les statuts en date du 5 mai 2011 d’une SARL BOULANGERIE COLMAR qu’il a constituée avec deux autres associés dans laquelle il a investi 120.000 € provenant du solde de son indemnisation en qualité de victime d’un acte terroriste .Il possédait 200 parts de la société dont le prix unitaire s’élevait à 10 €, cette société ayant pour objet principal l’exploitation d’un fonds de commerce de boulangerie pâtisserie à Rueil-Malmaison. Le résultat net comptable le

18 décembre 2012 étant déficitaire à hauteur de 74.100,11 €, Monsieur L. a cédé le 11 décembre 2013 ses parts pour un montant de 20.000 €.

Au titre de l’année 2013 il a déclaré aux services des impôts un total de salaires et assimilés pour un montant de 32.382 €.

En 2014 il a perçu le RSA pour un montant mensuel d’environ 450 € et sa déclaration fiscale ne mentionne aucun revenu imposable. En janvier 2014 il a racheté à hauteur de 2000 € son assurance vie et après ce rachat il lui restait sur ce compte un crédit de 787,63 €.

Pour l’année 2015 il justifie bénéficier du RSA ainsi que de l’allocation logement, cette dernière étant de 309,57 €.

Ne payant plus son loyer d’un montant mensuel de 1076 €, il a fait l’objet d’une procédure d’expulsion devant le tribunal d’instance de Puteaux en 2015. Il a été accompagné par le service Pôle solidarité de la préfecture des Hauts-de-Seine pour une aide à son relogement suite au non paiement des loyers. Il est l’objet de nombreuses relances pour des impayés et a fait l’objet d’une interdiction bancaire. Au titre de ses charges il a produit notamment un justificatif de ses charges d’électricité à hauteur d’environ 48 € par mois, des relances pour le non-paiement de son assurance AXA de 32, 25 € par mois. Ses charges de téléphone sont justifiées à hauteur de 37, 97 € par mois.

Pour mémoire il convient d’indiquer que les pièces relatives à 2016 postérieures au jugement de divorce qui ont été produites mentionnent que Monsieur L. a désormais un loyer d’environ 600 € par mois, qu’il perçoit toujours le RSA à hauteur de 470,95 € par mois, qu’il est inscrit au registre des voitures de transport avec chauffeur depuis le 10 septembre 2016 et qu’il bénéficie d’une carte professionnelle de conducteur de voiture transport avec chauffeur.

Concernant ses droits à la retraite: Monsieur L. a débuté sa vie professionnelle en 1989 et avait en 2012 cotisé un total de 65 trimestres au titre du régime général. Ses retraites complémentaires ANEP et CRICA ne sont pas renseignées

Il a indiqué dans sa déclaration sur l’honneur être propriétaire d’un terrain en Tunisie acquis au prix de 800’000 dinars. Ne pouvant régler son crédit, il indique ne plus détenir ce terrain. Il est propriétaire en Tunisie d’une maison estimé à 120.000 €, qu’il ne pourrait plus entretenir.

Suite à son attentat en Arabie Saoudite, il a perçu une indemnité de 258.472, 24 € au titre de la réparation de son préjudice versée par le Fonds de Garantie des Victimes des Actes de Terrorisme et autre Infractions, après transaction, sur la base de l’expertise effectuée par le Docteur A. en 2008.

Il indique qu’il a reçu un certain nombre de provisions à valoir sur l’indemnisation de son préjudice entre 2003 et 2008, sommes qu’il a utilisées avec son épouse pour régler les charges du ménage. En 2008 il a perçu le solde de son indemnité soit un montant de 120.000 € qu’il a investi dans le fond de boulangerie pâtisserie de Rueil-Malmaison dont il s’est retiré ensuite.

Selon l’article 270 du Code c ivil la prestation compensatoire a pour objet de compenser la disparité que le divorce crée dans les conditions de vie respective des époux. Selon l’article 271 elle doit être fixée en prenant en compte l’ensemble de la situation et en particulier l’état de santé des époux. Ainsi le handicap subi par Monsieur L. à la suite de l’attentat dont il a été victime doit être pris en compte dès lors qu’il a augmenté ses besoins. Si le Conseil Constitutionnel dans sa décision du 2 juin 2014 a déclaré le second alinéa de l’article 272 du Code c ivil contraire à la constitution au motif que l’interdiction de prendre en considération, pour fixer le montant de la prestation compensatoire, les sommes versées au titre de la compensation d’un handicap institue entre les époux des différences de traitement qui ne sont pas en rapport avec l’objet de la prestation compensatoire et méconnaît ainsi le principe de l’égalité devant la loi, il a cependant rappelé que les sommes versées à une personne en raison de son handicap ne sauraient être détournées de leur objet pour être affectées au versement de la prestation compensatoire dont cette personne est débitrice. Ainsi, les sommes versées par Monsieur L. par le Fonds de Garantie des Victimes des Actes de Terrorisme et autres infractions, (outre qu’il déclare les avoir utilisées pour les besoins du ménage et investies dans le commerce dont il s’est retiré ensuite), ne sauraient donc être prises en compte pour apprécier l’existence de la disparité dans la situation des époux.

Il a été indiqué dans le jugement que « Madame EL K. est assistante maternelle et a connu des périodes d’inactivité durant la vie commune. Elle justifie à ce jour percevoir un revenu de l’ordre de 1500 €.

Outre les charges de la vie courante, elle supporte un loyer de 213 € par mois.

Monsieur L. indique dans ses conclusions qu’en 1996 il avait acheté au nom de son épouse et pour elle une boutique de fleurs et qu’elle s’est montrée peu motivée pour travailler à cette époque. Il ajoute qu’elle a, par ailleurs, travaillé six mois dans un cabinet de dentiste avant de démissionner et ne peut prétendre avoir sacrifié sa carrière au profit de celle de son époux.

Le couple n’avait aucun patrimoine mobilier ou immobilier en commun.

Eu égard à la durée du mariage des époux, de leur âge, des conséquences des choix professionnels faits par Madame EL K. pendant la vie commune et pour l’éducation des deux enfants et en accord entre les époux, du patrimoine prévisible de ceux-ci en capital après la liquidation du régime matrimonial et de leurs droits prévisibles et de leur situation respective en matière de pension de retraite , il résulte de ce qui précède que la rupture du lien conjugal crée une disparité entre les époux au détriment de Madame EL K. justifiant que Monsieur L. lui verse une prestation compensatoire de 15.000 € en capital.

Sur la contribution à l’entretien et l’éducation des enfants :

Conformément à l’article 371-2 du code civil, chacun des parents doit contribuer à l’entretien et l’éducation des enfants à proportion de ses ressources, de celles de l’autre parent et des besoins de l’enfant ; cette obligation ne cesse pas de plein droit à la majorité des enfants.

La contribution à l’entretien et à l’éducation de l’enfant est fixée en fonction des ressources et charges respectives des parents ainsi que des besoins de l’enfant.

Cette contribution, d’ordre public en raison de son caractère essentiel et vital doit être satisfaite avant l’exécution de toute obligation civile de nature différente, notamment les emprunts immobiliers ou de consommation, les père et mère devant adapter leur train de vie en fonction de cette obligation et en tout cas s’efforcer d’offrir à leurs enfants un niveau de vie et d’éducation en relation avec leur propre niveau culturel et leur niveau socio-économique.

Monsieur L. demande à être dispensé de tout paiement au titre de sa participation à l’entretien et à l’éducation de ses deux enfants au motif de son insolvabilité.

Le premier juge a maintenu les dispositions provisoires concernant les enfants et donc le paiement d’une somme mensuelle mise à la charge de Monsieur L. d’un montant de 450 € par enfant.

Les éléments économiques du couple ont été examinés précédemment, étant précisé que contrairement à la prestation compensatoire qui s’évalue à la date du divorce, la contribution à la charge du père pour ses enfants doit tenir compte des éléments actuels.

La situation financière de Monsieur L. s’améliore légèrement puisque son loyer a diminué de moitié depuis le 26 avril 2016 et qu’une carte professionnelle de conducteur de VTC lui a été attribué par la préfecture le 15 juillet 2016 et que sa validité expire le 12 mai 2021. Certes il bénéficie toujours d’un RSA d’un montant mensuel de 471 € mais selon ses propres écritures il envisage désormais pour son activité d’avoir des revenus d’un montant d’environ 1200 € nets par mois. Il apparaît dans ces conditions équitable de réduire à 50 € par enfant et par mois la contribution mise à sa charge au titre de l’éducation et de l’entretien des mineurs étant rappelé que la situation financière actuelle de Madame EL K. n’a pu être justifiée, ses conclusions ayant été déclarées irrecevables.

Sur les dépens :

L’appelant conserve à sa charge les dépens de la procédure d’appel.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort, après débats en chambre du conseil,

INFIRME partiellement le jugement rendu le 20 août 2015,

ET STATUANT à nouveau,

DIT que Monsieur L. est tenu de payer à Madame EL K. une prestation compensatoire sous la forme d’un capital de15.000 € net de frais et de droit et au besoin l’y condamne,

FIXE, à compter du présent arrêt , à la somme mensuelle de 50 € par enfant soit 100 € le montant de la contribution à l’entretien et l’éducation des enfants due par Monsieur L. à Madame EL K. , au besoin l’y condamne,

DIT que cette contribution sera due, après la majorité, jusqu’à la fin des études poursuivies par l’enfant dont il devra être justifié chaque année ou jusqu’à ce que l’enfant exerce une activité rémunérée non occasionnelle lui permettant de subvenir à ses besoins,

DIT que ladite contribution sera réévaluée le 1er février de chaque année à la diligence du débiteur en fonction de l’indice mensuel publié par l’INSEE des prix à la consommation des ménages urbains dont le chef est ouvrier ou employé ( série France hors tabac ) et pour la première fois le 1er février 2017,

A cet effet, le dernier indice publié à la date de ce jour sera retenu comme indice de base et l’indice référence sera le dernier indice connu à la date de réévaluation,

DEBOUTE Monsieur L. de ses autres demandes,

CONFIRME le jugement en toutes ses dispositions non contraires au présent arrêt,

DIT que Monsieur L. conservera la charge des dépens qu’il a exposés en appel.

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