Centre Européen de recherche sur le Risque, le Droit des Accidents Collectifs et des Catastrophes (UR n°3992)

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COMPTE-RENDU DE L’ASSEMBLÉE GÉNÉRALE DE LA SFDAS, M-F. Steinlé-Feuerbach

Conférence de Bertrand de Lacombe :

La politique extérieure de l’Union européenne en matière de transport aérien 

par :

Marie-France Steinlé-Feuerbach

Professeur émérite en Droit privé et Sciences criminelles à l’Université de Haute-Alsace

Membre fondateur et Directeur honoraire du CERDACC

Membre de la SFDAS

C’est au pied du superbe sapin de Noël de l’Aéro-Club de France à Paris que s’est déroulée l’assemblée générale de la Société Française de Droit Aérien et Spatial (SFDAS :   https://sfdas.org/), le 29 novembre 2023. Son Président, Xavier Delpech, se réjouit du nombre et de la qualité des participants. Pascal Dupont, Secrétaire Général annonce 19 nouvelles candidatures pour adhérer à la prestigieuse société savante, lesquelles sont toutes acceptées à l’unanimité. Sur l’année écoulée, la SFDAS s’est ainsi enrichie de 37 nouveaux membres, preuve de sa notoriété, et Xavier Delpechconstate que la Société se transforme, c’est un club qui évolue en association de masse, le rôle du président et du secrétaire général est d’accompagner cette croissance et de prendre des initiatives comme le passage de deux à trois réunions annuelles. Du côté des commissions, après celle des drones, celle des aéronefs se réunira sous peu. Parmi les projets pour 2024, est annoncée une conférence sur le droit pénal aérien pour le 28 mars ainsi que le développement de partenariats avec les universités à l’image de celui existant avec l’Institut François Gény de l’Université de Lorraine.

L’assemblée générale est toujours, en plus, l’occasion d’une conférence, consacrée cette année à « La politique extérieure de l’Union européenne en matière de transport aérien » avec un brillant exposé de Bertrand de Lacombe, expert national détaché auprès de la Commission européenne, qui a négocié un certain nombre de règlements et participé à l’élaboration de plusieurs directives en matière aérienne et pour lequel ce sujet technique est illustratif de ce qu’est la Commission européenne. Après avoir posé le cadre général du fonctionnement des instances européennes, l’expert aborde les notions de souveraineté : l’Union européenne (UE) a une part de souveraineté, mais elle n’est pas totalement souveraine en matière extérieure.

L’aviation se situe dans un champ qui au départ était réservé aux États, même si une coopération internationale s’est organisée donnant naissance à la Convention de Chicago du 7 décembre 1944, laquelle a reconnu les grandes libertés de l’air à commencer par le droit de simple survol, la possibilité de faire une escale technique jusqu’au cabotage permettant à un transporteur aérien d’effectuer des transports internes dans un autre Etat que celui de sa nationalité.   L’article premier de cette convention dispose que chaque État a sa propre souveraineté (« Les États contractants reconnaissent que chaque État a la souveraineté complète et exclusive sur l’espace aérien au-dessus de son territoire ». L’intervenant rappelle par ailleurs que 245 000 personnes ont été rapatriées par Air France à la demande des autorités françaises pendant le Covid. Il en déduit donc qu’existe encore une relation forte entre les compagnies nationales et les États qui ne sont pas prêts à accepter une compétence supranationale.

Le conférencier développe le cadre juridique des compétences extérieures de l’Union européenne et précise qui fait quoi (Conseil européen, Commission européenne, Conseil de l’UE, Parlement européen) avant de souligner deux domaines principaux : la politique étrangère commune ainsi que la politique commerciale, laquelle est la mieux acceptée. L’article 207 du Traité sur le fonctionnement de l’UE (ex article 133 du Traité des communautés européennes (TCE) dit Traité de Rome du 25 mars 1957) dispose que la politique commerciale commune est fondée sur des principes uniformes et que le Parlement européen et le Conseil de l’UE adoptent les mesures définissant le cadre dans lequel elle est mise en œuvre. Rappelons que la Commission agit sous le contrôle du Conseil et que le Parlement, malgré un renforcement, conserve un rôle mineur.

Mais les temps changent progressivement, alors qu’au départ, il ne s’était pas passé grand-chose en matière du transport, à partir de 1991 et 1993 on assiste à une montée en puissance progressive de l’UE en la matière. On ne parle alors que du marché européen mais les États-Unis commencent à négocier des accords séparés avec des États européens. La Commission va saisir la Cour de Justice des Communautés Européennes (CJCE ) en 1998, laquelle va rendre des arrêts « open skies » en 2002 pour que les transporteurs européens soient traités de manière égalitaire (Cf. : Valentin Buruiana, « Les relations extérieures de l’Union européenne dans le domaine du transport aérien :  Schuman Papers n°714 https://www.robert-schuman.eu/questions-d-europe/714-les-relations-exterieures-de-l-union-europeenne-dans-le-domaine-du-transport-aerien ).

À partir de 2005, la politique externe de l’UE repose sur trois piliers. Soit chaque État négocie, soit la Commission a un mandat pour négocier, soit, avec l’autorisation des États, des accords sont passés au niveau européen avec des pays stratégiques.

Aujourd’hui, il y a des accords horizontaux auxquels s’ajoutent 1100 accords bilatéraux qui ont été uniformisés. Il existe des accords avec la Chine et la Corée du Sud, mais des États membres de l’UE les refusent toujours.

En ce qui concerne la politique de voisinage, des accords sont passés avec plusieurs États comme le Maroc et Israël. Les États membres de l’UE ont le bénéfice du marché, les États tiers intègrent les accords communautaires. L’Union européenne s’est donc imposée comme un acteur important, notamment pour les marchés aériens. En termes de perspectives géographiques, on peut penser à de nouveaux accords, comme par exemple avec l’Inde.

Puis, récemment, il y a eu des développements à l’extérieur en matière de sécurité. Il y a également l’AESA (Agence de l’Union européenne pour la sécurité aérienne), entrée en fonction en septembre 2003 et basée à Cologne qui peut conclure des accords bilatéraux portant sur la sécurité.

En conclusion : nous sommes actuellement à la croisée des chemins !

L’intervention très applaudie de Bertrand de Lacombe est suivie, conformément à la tradition, d’une collation, laquelle fournit l’occasion de discuter de projets comme la participation active d’éminents membres de la SFDAS à un colloque à Mulhouse sur « Risques et voyages », projeté au printemps 2024…