Centre Européen de recherche sur le Risque, le Droit des Accidents Collectifs et des Catastrophes (UR n°3992)

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CLIMAT ET RÉSILIENCE : MISE EN PLACE DU « ZÉRO ARTIFICIALISATION NETTE », B. Maieron, A. Vaeckenstedt, K. Saint-Omer

COMMENTAIRE DE LA LOI N° 2023-630 DU 20 JUILLET 2023 VISANT À FACILITER LA MISE EN ŒUVRE DES OBJECTIFS DE LUTTE CONTRE L’ARTIFICIALISATION DES SOLS ET À RENFORCER L’ACCOMPAGNEMENT DES ÉLUS LOCAUX

Bettina Maieron, Amélie Vaeckenstedt, Kathelyne Saint-Omer

Etudiantes en Master 1 de Droit public – Métiers de l’administration – Université de Haute-Alsace

En France, au cours de la décennie précédente, 24 000 hectares d’espaces naturels, agricoles et forestiers ont été consommés chaque année en moyenne, soit l’équivalent de cinq terrains de football par heure. Cette consommation des espaces a eu lieu au détriment des surfaces agricoles, zones où la tension immobilière est bien moins présente que dans les zones urbaines (Gouvernement. Artificialisation des sols, publié le 27 septembre 2023). Les conséquences sont d’ordre écologique et socio-économique. La préoccupation environnementale sur le long terme concerne l’accélération de la perte de la biodiversité, le réchauffement climatique, l’amplification des risques d’inondations, une réduction de la capacité des terres agricoles à nous nourrir, l’accroissement des dépenses liées aux réseaux ou encore l’amplification de la fracture territoriale où la polarisation autour des grandes villes de France ce constate et qui s’oppose à la ruralité de la France.

Ce phénomène de consommation des espaces naturels est ce qu’on appelle l’artificialisation. L’article 192 de la loi dite Climat et Résilience (L. n°2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets) définit l’artificialisation comme « l’altération durable de tout ou partie des fonctions écologiques d’un sol, en particulier de ses fonctions biologiques, hydriques et climatiques, ainsi que de son potentiel agronomique par son occupation ou son usage ». La notion d’artificialisation des sols regroupe ainsi trois dimensions interdépendantes : l’imperméabilisation des sols, la perte d’espaces naturels agricoles et forestiers qui dans les faits est un changement d’usages des sols et la forme du développement urbain (dé-densification par l’étalement urbain) (Rapport du groupe de travail présidé par Anne-Catherine LOISIER, sénatrice de la Côte d’Or, Anne-Laurence Petel, députée des Bouches-du-Rhône, Les enjeux de l’artificialisation des sols : diagnostic, comité pour l’économie verte)

L’artificialisation ne doit pas être confondue avec la consommation d’espaces qui est selon l’article 194 de la loi Climat et Résilience « la création ou l’extension effective d’espaces urbanisés sur le territoire concerné ».

L’artificialisation des sols a donc émergé comme un nouvel enjeu politique en raison de la perte de biodiversité et les conséquences du changement climatique. La loi « Climat et Résilience » a fixé pour objectif l’absence de toute artificialisation nette des sols en 2050 et une réduction du rythme de l’artificialisation des sols entre 2021 et 2031 afin que la consommation totale d’espace observée à l’échelle nationale soit inférieure à la moitié de celle observée sur les dix années précédant cette date. C’est ce qu’il est convenu d’appeler l’objectif de « Zéro Artificialisation Nette » ou ZAN. Concrètement, ce texte a fait apparaître des difficultés de mise en œuvre notamment pour l’élaboration des documents d’urbanisme devant prendre en considération la nouvelle législation, mais aussi un problème pour les communes souhaitant accueillir de nouveaux habitants et de nouvelles constructions. L’objectif de « zéro artificialisation nette » réduit alors à néant toute hypothèse pour les communes d’artificialiser et de se développer.

En raison des retours négatifs de la loi Climat et Résilience de la part des collectivités territoriales et des élus locaux, une nouvelle loi à l’initiative du Sénat a été promulguée. C’est la loi n°2023-630 du 20 juillet 2023 visant à faciliter la mise en œuvre des objectifs de lutte contre l’artificialisation des sols et à renforcer l’accompagnement des élus locaux (JO 21.7.23, https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000047866733. – Sur laquelle, voir : BALAGUER (F.), « La réforme de la ZAN par la loi du 20 juillet 2023 » : AJDA 2023, p. 1654. – BENECH (F.), « Objectif Zéro anti artificialisation nette (ZAN) : quelles nouvelles modalités de mise en oeuvre ? »: AJCT 2023, p. 457. – BONNEAU (O.) et DESCUBES (L.), « La préoccupation environnementale ou la « première pierre » d’une opération immobilière » : Gazette du Palais, 3 oct. 2023, p.48. – COMBRET (J.), « Loi de mise en œuvre des objectifs de lutte contre l’artificialisation des sols : mesures intéressant la pratique notariale » : Defrénois, 7 sept. 2023, n° DEF216a7. – LE DORH (M.), “Quelle déclinaison locale des objectifs nationaux du ZAN ? » : AJCT 2023, p. 536. – PASTOR (J-M.), « Les députés adoptent le « zéro artificialisation net » rénové » : AJDA 2023 page 1309). Cette nouvelle loi vise à faciliter la mise en œuvre des objectifs de lutte contre l’artificialisation des sols et à renforcer l’accompagnement des élus locaux. L’objectif de cette loi est d’assouplir le cadre juridique mis en place par la loi de 2021, mais non pas de modifier les objectifs à atteindre.

La loi du 20 juillet 2023 vise toujours l’objectif de « zéro artificialisation nette » afin de lutter contre l’artificialisation des sols (I) mais elle semble remettre cependant en cause l’application pratique de ce principe qui résultait de la loi de 2021 (II).

I – La réaffirmation d’un objectif fort de lutte contre l’artificialisation des sols

La loi Climat et Résilience de 2021 vise à la densification des zones urbaines (A), cependant afin que l’objectif fixé soit réalisé il est impératif de prévoir des autorités de contrôle qui devront veiller à l’application de la loi, ce que la loi du 20 juillet 2023 vient renforcer (B).

A – Une préférence vers la densification des zones urbaines

La France et l’Union européenne ont entamé une transition écologique ambitieuse visant à la neutralité carbone d’ici 2050, dans ce cadre l’objectif est de réduire l’artificialisation des sols. Dans le but d’accomplir l’objectif fixé, tous les domaines de notre vie sont concernés : consommer, produire et travailler, se déplacer, se loger, se nourrir et renforcer la protection judiciaire de l’environnement.

Divers moyens ont été soulevés afin de lutter contre l’artificialisation des sols. On retrouve notamment le besoin de faire des logements existants des logements mieux isolés, des villes moins polluées, avec moins de bétonisation des terres, et soutenir les énergies renouvelables.

Les logements avec une isolation faible voire quasi inexistante sont des habitations avec une forte consommation d’énergie. Depuis 2023, les propriétaires de ces logements sont contraints d’effectuer des travaux de rénovation énergétique s’ils veulent augmenter le loyer de leur logement en location. Par conséquent, sera interdit à la location tous les logements dont l’étiquette du diagnostic de performance énergétique est comprise entre E et G d’ici 2034. Ces logements seront alors considérés comme étant indécents au regard de la loi (Gouvernement. Interdiction à la location des logements avec une forte consommation d’énergie, modifié le 7 février 2023).

Pour lutter contre l’altération durable des fonctions écologiques des sols, il est nécessaire de moins bétonner les espaces. Pour rappel, la loi de 2021 Climat et Résilience fixe pour l’ensemble des collectivités territoriales l’objectif de zéro artificialisation nette. Dans cet élan, il est désormais interdit d’implanter de nouveaux centres commerciaux sur des sols naturels ou agricoles. Toute construction contenant une surface de vente de plus de 10 000 m2 sera interdite sans exception. Concernant les constructions de plus de 3 000 m2, elles pourront faire l’objet d’une dérogation examinée par le préfet. Ainsi, cette démarche de sobriété foncière se résume à dire que tout ce qui est pris à la nature devra lui être rendu.

Pour finir, il est essentiel de soutenir les énergies renouvelables. Les énergies renouvelables proviennent de sources naturelles non épuisables, par exemple le soleil et le vent. Il est désormais obligatoire d’installer des panneaux solaires ou des toits végétalisés lors d’une construction ou d’une rénovation lourde de grands bâtiments.

Par l’ensemble de ces mesures, on constate qu’on entre dans une nouvelle ère tournée vers la protection de l’environnement et une lutte contre l’étalement pour une réduction de l’atteinte à la biodiversité. Désormais, le code de l’environnement et le code pénal prévoient des sanctions en cas de dégradation durable de la faune, de la flore ou de l’eau (Ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires, Ministère de la Transition énergétique. Loi climat et résilience : l’écologie dans nos vies [en ligne], publié le 20 juillet 2021).

B – Un durcissement du contrôle des autorités publiques

Dans le cadre de la nouvelle loi du 20 juillet 2023, un contrôle renforcé des autorités publiques est énoncé pour la bonne application sur le long terme du zéro artificialisation nette. Ce procédé vise à combler les lacunes que pouvait présenter la précédente loi de 2021.

Il y avait déjà un contrôle prévu par la précédente loi de 2021. Selon Vincent Doebelin, ce contrôle correspondait à un processus d’évaluation des politiques menées par l’Etat et les collectivités territoriales visant « à plus de transparence mais aussi, dans un contexte de défiance entre les citoyens et les acteurs publics, à répondre aux attentes toujours plus fortes des populations en termes d’efficacité (V. DOEBELIN, « L’artificialisation des sols : une révolution de la loi Climat et résilience ! » : Revue de droit rural n°497. 1er novembre 2021).

De ce point de vue, la loi de 2023 a continué le processus. Le décret n°2023-1096 du 27 novembre 2023 relatif à l’évaluation et au suivi de l’artificialisation des sols a été mis en place permettant de renforcer plus clairement le contrôle en imposant une nomenclature qui devra permettre d’évaluer et suivre l’artificialisation des sols dans les documents de planification urbaine. Ce décret permet également d’apporter des précisions quant au rapport local de suivi de l’artificialisation des sols, qui, d’après le ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires ainsi que le ministère de la Transition énergétique, doit s’appuyer sur « des données mesurables et accessibles, que possèdent l’ensemble des communes ou leur groupements, ou qui leur seront mises à disposition par l’Etat en particulier à travers un observatoire national de l’artificialisation des sols » (Gouvernement. Communiqué de presse – « Zéro artificialisation nette » : publication de décrets d’application, publié le 28 novembre 2023, https://www.ecologie.gouv.fr/communique-presse-zero-artificialisation-nette-publication-decrets-dapplication).

Un autre décret du 27 novembre 2023, n°2023-1097, relatif à la mise en œuvre de la territorialisation des objectifs de gestion économe de l’espace et de lutte contre l’artificialisation des sols, vient préciser les modalités « d’intégration et de déclinaison des objectifs de gestion économe de l’espace et de lutte contre l’artificialisation des sols dans les documents de planification régionale (SRADDET, SAR, SDRIF, PADDUC) et d’urbanisme ». Toujours, selon le ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires ainsi que le ministère de la Transition énergétique, ce décret devrait permettre d’apporter un plus grand renforcement quant à la mise en œuvre de la loi de 2023, notamment en ce qui concerne les critères de territorialisation des objectifs régionaux tout en tenant compte de spécificités locales, le tout en adoptant une approche davantage proportionnée et qualitative du rôle de la région par rapport aux documents infrarégionaux, en « fixant des cibles chiffrées de manière facultative plutôt qu’obligatoire » (Gouvernement. Communiqué de presse – « Zéro artificialisation nette » : publication de décrets d’application, publié le 28 novembre 2023, https://www.ecologie.gouv.fr/communique-presse-zero-artificialisation-nette-publication-decrets-dapplication).

Dans un but de simplification visant à la bonne mise en place de cette réforme, le Ministère de la Transition écologique et de la cohésion des territoires a publié un guide synthétique présentant les grands principes de la politique de sobriété foncière. Ce guide permet une plus grande compréhension des indications en y laissant des définitions et explications.

Les communes ou intercommunalités ont un rôle important et doivent régulièrement effectuer un débat afin de présenter un rapport permettant de considérer les atteintes à l’artificialisation des sols. En effet, le code général des collectivités territoriales (CGCT) prévoit en son article L2231-1 : « Le maire d’une commune ou le président de l’établissement public de coopération intercommunale doté d’un plan local d’urbanisme, d’un document d’urbanisme en tenant lieu ou d’une carte communale présente au conseil municipal ou à l’assemblée délibérante, au moins une fois tous les trois ans, un rapport relatif à l’artificialisation des sols sur son territoire au cours des années civiles précédentes. Le rapport rend compte de la mesure dans laquelle les objectifs de lutte contre l’artificialisation des sols sont atteints. Le rapport donne lieu à un débat au sein du conseil municipal ou de l’assemblée délibérante. Le débat est suivi d’un vote. Le rapport et l’avis du conseil municipal ou de l’assemblée délibérante font l’objet d’une publication dans les conditions prévues au dernier alinéa de l’article L. 2131-1 […] ».

L’importance accordée à l’objectif du zéro artificialisation nette n’est pas des moindres puisque cet article renvoie à l’idée d’une plus grande information au citoyen en publiant régulièrement les décisions. Il impose toutefois une régularité. En effet, cette discussion en Conseil municipal ou en assemblée délibérante doit s’effectuer au minimum une fois tous les trois ans. Il ne s’agit donc non pas d’une discussion à prendre à la légère dont le problème se réglerait en une seule fois, mais bien d’un sujet sérieux auquel il faut débattre régulièrement en prenant en considération les évolutions sociétales, industrielles et environnementales.

Il existe toutefois une remise en cause de ce contrôle des autorités publiques en ce que les contours restent flous et mouvants. Le Sénat a donc avancé 25 mesures visant à faciliter la mise en œuvre des objectifs de ZAN de la loi Climat et Résilience en se concentrant sur le règlement de l’urbanisme ainsi que l’architecture globale du ZAN car « il s’agit des mesures les plus nécessaires et les plus urgentes au regard du calendrier » (Jean-Baptiste Blanc, Valérie Létard et plusieurs de leurs collègues. Objectifs de « zéro artificialisation nette » au cœur des territoires. Déposé au Sénat. Texte n°205, 14 décembre 2022). Dans son action, le Sénat considère qu’il faut apporter souplesse, pragmatisme et efficacité à l’application du ZAN dans les territoires afin qu’il ne se heurte pas à des obstacles juridiques ou pratiques. L’idée n’est pas d’aller à l’encontre de la loi Climat et résilience, mais de bien comprendre son importance au vu de ses objectifs que le Sénat considère comme « structurants et novateurs ». L’objectif de réduction de 50% de l’artificialisation en 2031 et l’atteinte du zéro artificialisation nette en 2050 ne doit en aucun cas être remis en cause, bien au contraire. Mais il faut pouvoir trouver des solutions efficaces afin de parvenir à sa réalisation pour répondre à « une urgence climatique et environnementale incontestable, qui doit engager l’ensemble de la Nation dans une démarche commune de sobriété foncière ».  Ainsi, le Sénat évoque l’importance de cette loi, mais se permet de remettre en cause son contrôle au vu des enjeux futurs importants qu’elle représente.

Même si elle conserve donc l’objectif du zéro artificialisation nette, la loi de 2023 modifie plusieurs points de la précédente loi de 2021 ce qui pourrait bien remettre en cause le principe du ZAN.

II – La remise en cause du dispositif « zéro artificialisation nette » de 2021 par la loi de 2023

Face à l’objectif de zéro artificialisation nette de 2021, réaffirmé en 2023, il est important de faire une analyse critique de la loi de 2023 en explorant l’implication des aménagements pour l’accompagnement des élus locaux (A) ainsi qu’en examinant la nécessité de modifier les documents d’urbanisme (B). Cette remise en cause permet d’examiner les potentiels changements sur le paysage politique et urbanistique.

A – Des aménagements à l’accompagnement des élus locaux

La loi Climat et résilience est un enjeu important en matière d’urbanisme et surtout en matière environnementale. Cette loi envisage que d’ici 2031, une enveloppe de 125 000 hectares soit prévue dont 12 500 hectares réservés à des projets d’envergure nationale ou européenne tels que les projets industriels majeurs, la construction de lignes à grande vitesse, de prisons et de futurs réacteurs nucléaires. Parmi ceux-ci, 10 000 hectares seront partagés entre les régions couvertes par un schéma régional de d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires (SRADDET) en proportion de leur enveloppe d’artificialisation définie pour la période 2021-2031. Un arrêté du ministre de l’urbanisme détaillera cette répartition, et au-delà de ce forfait, tout excédent de consommation ne pourra pas être déduit de l’enveloppe des régions. Les autorités compétentes dans la mise en œuvre de ce projet sont les élus locaux car ce sont eux qui seront en première ligne afin de pouvoir aménager petit à petit les territoires dont ils sont responsables. Mais la loi de 2023 permet aux élus locaux d’avoir une certaine marge de manœuvre car c’est leur rôle, sur leur territoire, de mettre en œuvre ces objectifs de zéro artificialisation nette des sols. Ils sont libres de choisir les moyens par lesquels ils vont atteindre les objectifs fixés. Surtout, la loi crée une garantie rurale d’un hectare pour toutes les communes, ce qui a été salué.

Ce projet, de par son envergure, n’est pas évident à mettre en œuvre car il existe beaucoup d’éléments à prendre en considération. En effet, la loi de 2023 vise principalement à développer les territoires tout en réduisant leur artificialisation. Ceci a pour conséquence de modifier de nombreux documents d’urbanisme afin d’y intégrer les objectifs de réduction de l’artificialisation.

En outre, les élus locaux bénéficieront d’outils pour leur permettre de ne pas nuire au développement des objectifs de zéro artificialisation nette en mettant « en sursis à statuer les projets qui pourraient mettre en péril l’atteinte des objectifs de réduction de l’artificialisation nette des sols » (Vie publique, au coeur du débat public. Loi du 20 juillet 2023 visant à faciliter la mise en œuvre des objectifs de lutte contre l’artificialisation des sols et à renforcer l’accompagnement des élus locaux, publié le 21 juillet 2023) par exemple.

Afin de pouvoir réaliser la mise en place de cette révolution en matière d’urbanisme et d’environnement, les élus locaux peuvent s’appuyer sur différents organes ou institutions pour les diriger. D’une part, la création de la conférence ZAN va permettre aux élus locaux de se réunir pour discuter de la mise en œuvre des objectifs de réduction de l’artificialisation des sols. Cette conférence assiste l’exécutif régional durant tout le processus, qu’il s’agisse de projets nationaux ou européens. D’autre part, la région en cas de désaccord sur la liste des grands projets, pourra saisir une commission régionale de conciliation sur l’artificialisation des sols (Vie publique, au cœur du débat public. Loi du 20 juillet 2023 visant à faciliter la mise en œuvre des objectifs de lutte contre l’artificialisation des sols et à renforcer l’accompagnement des élus locaux, publié le 21 juillet 2023) qui aura pour but de régler le désaccord.

La notion de désaccord est d’ailleurs particulièrement d’actualité depuis la déclaration du président Les Républicains (LR) de la région Auvergne-Rhône-Alpes, Laurent Wauquiez, le 30 septembre 2023. Son objectif n’est pas des moindres car il souhaite retirer la région Auvergne-Rhône-Alpes du processus de zéro artificialisation nette des sols en déclarant que cette loi est « uralicide », remettant donc en question tout le processus. Dès lors, cette déclaration a suscité de nombreux débats ainsi que la colère de nombreux acteurs politiques. En effet, le ministre de l’écologie, Christophe Béchu, a rappelé que la zéro artificialisation nette des sols permet de protéger davantage les terres agricoles qui sont vitales notamment pour la souveraineté alimentaire. (https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2023/10/02/la-region-auvergne-rhone-alpes-peut-elle-vraiment-se-retirer-du-dispositif-zero-artificialisation-nette_6192053_4355770.html).

B – Une modification nécessaire des documents d’urbanisme

La loi « Climat et résilience » de 2021 nécessite des mesures nécessaires et urgentes. Un calendrier a été instauré pour encadrer la mise en œuvre de ces mesures par les collectivités locales. Ces délais ont été élargis en fonction de la nature du document d’urbanisme et du secteur concerné. De nombreux documents d’urbanisme sont concernés par les mesures et les objectifs de la loi. Il est nécessaire en vertu de l’envergure du projet que les documents d’urbanisme soient adaptés aux objectifs de ZAN. Les documents d’urbanisme concernés sont notamment les schémas régionaux d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires plus connu sous le nom de SRADDET, les schémas de cohérence territoriale plus connu sous le nom de SCOT, mais aussi les plans locaux d’urbanisme (PLU) ou les cartes communales (V. DOEBELIN. art. préc.).

La modification de ces documents est nécessaire et sont soumis à un certain délai. En effet, il avait été prévu, initialement, que les SRADDET par exemple entrent en vigueur le 23 août 2023. Cependant, la loi de 2023 a reporté ce délai en faisant bénéficier les collectivités territoriales d’un délai de 6 mois supplémentaires. Ainsi, les SRADDET devront entrer en vigueur au plus tard le 22 novembre 2024. Concernant les SCOT et les cartes communales en l’absence d’un PLU, le calendrier a été rallongé de façon plus large que pour les SRADDET. Ces documents entreront en vigueur à la date du 22 février 2027 pour les SCOT et du 28 février 2028 pour les PLU et les cartes communales (https://www.aua-toulouse.org/artificialisation-des-sols-focus-sur-la-loi-zan-du-20-juillet-2023/).

Enfin, afin d’avoir une certaine certitude que les collectivités et leurs élus locaux mettent en place ces objectifs dans leurs documents d’urbanisme, des sanctions sont prévues. Le législateur a créé les conditions d’une certaine efficacité en accompagnant ces délais de sanctions assez sévères si ceux-ci ne sont pas correctement respectés. L’objectif est que les collectivités doivent agir de façon assez rapide. Par exemple, l’absence d’entrée en vigueur du SCoT incluant les objectifs de ZAN, dans le délai imparti, aura une incidence majeure sur l’urbanisation de la collectivité. En effet, jusqu’à la régularisation du document d’urbanisme, les ouvertures à l’urbanisation seront empêchées (V. DOEBELIN, art. préc.). De même pour les PLU ou cartes communales qui ne respecteront pas ce délai, cela entraînera une impossibilité pour le territoire de délivrer des autorisations d’urbanisme.